islamisme: définitions
  extraits de Jean-Paul Gourévitch:  la croisade islamiste (Pascal Galodé) 2011.

Définitions de l'islam
sunnites et chiites
islam et islamisme
islamophobie
les constellations de la galaxie islamiste



Définition de l'islam

Pour le Larousse, le terme islam vient de l’arabe et signifie soumission à Dieu. Définition contestée par les philologues dont certains rappellent que   le terme est cousin du verbe « slam » qui signifie le temps de repos après l’accomplissement d’un devoir et renvoie aux idées de paix et de protection. D’autres soulignent que le terme « muslim », mot provenant de la même racine « s,l,m, » désigne ce qui est intact et permet le salut.
Le musulman serait celui qui est protégé lorsqu’il s’est réconcilié avec Dieu et soumis à  lui.

L’islam avec une minuscule désigne la religion et la civilisa-tion des musulmans et avec une majuscule le monde musulman. Le substantif musulman s’entend de celui qui professe la religion musulmane. L’adjectif musulman se rapporte à  tout ce qui concerne l’islam.
Dans l’islam, le Coran révélé par Dieu (Allah) est, avec la tradition (sunna), et les hadiths (paroles et actes rapportés de Mahomet),  le fondement de la vie religieuse et politique.
L’islam repose sur cinq piliers de la foi:
. la profession de foi (chahada),
. la prière rituelle cinq fois par jour,
. le ramadan et son jeûne pendant un mois de l’année,
. le pélerinage rituel à  La Mecque d’où le croyant revient El Hadj,
. l’aumône rituelle (zakat).

Au-delà de ces préceptes partagés par tous, les musulmans se divisent en trois grandes familles
. les « sunnites » (attachés à la tradition),
. les « chiites » qui se réclament d’Ali gendre et cousin de Mahomet et qui seraient moins attachés à la lettre du Coran, et
. les « kharidjites », rigoristes et adeptes d’une vie exemplaire.

Le sunnisme lui-même comporte quatre écoles de pensée religieuse qui ont en commun de se référer pour la jurisprudence (fiqh) au Coran, à la sunna, à̀ l’ijma (le consentement des experts) et aux analogies (qiyas) . Ce sont
– Le hanbalisme conservateur qui a donné naissance au wahhabisme (Arabie Saoudite);
– Le malikisme (Maghreb, Afrique de l’Ouest, Etats du golfe, France) plus moderniste ;
– Le caféisme (Indonésie et corne de l’Afrique) qui privilégie le consensus;
– Le hanafisme (Turquie, Inde, Pakistan, Egypte), la plus libérale .

Les chiites se divisent en de nombreuses branches: alaouites, alévis, bahaïs, duodécimains, ismaéliens, zai dites...

La fracture chiites-sunnites

A la mort de Mahomet en 632, les habitants de Médine et de La Mecque se divisent sur la succession. A Ali, époux de Fatima, une des filles du prophète, les compagnons de Mahomet préfèrent Abou Bakr (632-634) auquel succède à sa mort, son conseiller, Omar (634-644). Celui-ci poignardé par un non musulman est remplacé par Uthman (644-656) lequel est à son tour assassiné.
Ali prend alors le pouvoir en 656. Il prône la rigueur pour l’application de l’islam dans la vie quotidienne et entre en conflit avec les sunnites pour des raisons théologiques.  Plutôt que de combattre, les deux camps recourent à un arbitrage, ce qui irrite plusieurs partisans d’Ali qui quittent son camp pour former la secte des Kharidjistes  Ali est assassiné en 661 par l’un d’eux.
Al-Hussein, son fils cadet,  rassemble ses partisans qui affrontent les sunnites à Kerbala en 680 dans un combat inégal. Al Hussein est tué et décapité. La rupture entre sunnites et chiites est consommée.
Pour les non-musulmans, l’opposition eschatologique entre sunnites et chiites paraît disproportionnée par rapport aux violences qu’elle a engendrées ces dernières années et qui ont fait des dizaines de milliers de victimes. Mais ces antagonismes recuits pendant des siècles ont façonné des haines inexpiables. Dans ces pays où l’Etat redistribue en priorité la richesse à  ses fidèles, les enjeux sont  politiques (s’emparer du pouvoir), sociétaux (faire cesser les persécutions et les discriminations) et sociaux (bénéficier des fruits de son travail et des aides sociales et médicales dispensées par l’Etat et les organismes caritatifs) .
 

Evolution   des termes  "islamisme" et  "islamiste"

Le terme français islamisme est employé depuis le XVIIIe siècle. Il ne comporte aucune connotation de violence. L’adjectif islamique indique « ce qui appartient à l’islam » et le verbe islamiser signifie « convertir à  l’islam ».

Au XXe siècle, le terme « islamisme »  mais prend progressivement un sens plus politique. Comme de nombreux substantifs en –isme, il se réfère à  un courant de pensée. Pour ses analystes, il s’agit d’une interprétation de la doctrine musulmane comme guide pour l’action politique.
Faire  croire qu’islam et islamisme sont consubstantiels,  est à la fois la position des  islamistes radicaux qui veulent déstabiliser les Etats nations pour créer un cycle agression-répression qui fera basculer par solidarite  l’ensemble du monde musulman dans leur camp, et celle de leurs adversaires les plus déterminés.
« La doctrine de l’islam, c’est l’islamisme, comme la doctrine des chrétiens, c’est le christianisme » (Bernard Antony).

Définitions actuelles

L'islamisme selon Bruno Etienne 
C'est « l’utilisation politique de l’islam par les acteurs d’une protestation antimoderne perçue comme portant atteinte à  leur identité à  la fois nationale et religieuse ».

L'islamisme seon Olivier Roy
C’est « une idéologie qui veut faire de l’islam et du respect intégral de la charia un modèle politique alternatif à  la démocratie ».

Les deux le considèrent comme une doctrine politique utilisant la religion comme vecteur d’un courant protestataire. La différence réside dans ce que l’islam combat.
Pour Etienne, c’est la modernité. Pour Roy, la démocratie.

islamophobie


 Le terme "islamophobie" apparaît,  selon Caroline Fourest et Fiametta Venner, en Iran lors de la révolution de 1979 pour désigner le blasphème contre l’islam. Les mollahs iraniens qui souhaitaient faire passer les femmes qui refusaient de porter le voile pour de « mauvaises musulmanes » les accusaient d’être « islamophobes ». Il a été  réactivé pour justifier la fatwa contre Salman Rushdie.

Pour la  productrice et journaliste d'extrême-gauche Rokhaya Diallo : « l’islamophobie est un nouveau racisme ».


Les constellations de la galaxie islamiste

L’islamisme qui associe étroitement politique et religion doit être dissocié de mouvements religieux dont la thématique est proche mais qui s’inscrivent dans une autre temporalité.

Le fondamentalisme  prétend revenir aux origines de la doctrine religieuse, rétablir la charia, un Etat islamique. Toute la science se trouve dans le Coran. « Le Coran, tout le Coran, rien que le Coran ». Dans ce cadre, il pousse ses fidèles à adopter un comportement agressif vis-à-vis de ceux qui ne pensent pas comme eux, qu’ils soient musulmans, membres d’une autre confession ou agnostiques. Ils rejettent la modernité du monde occidental, sa liberté de croyance et de mœurs, et se réfèrent à  Mawdudi (1903-1979),  journaliste et théologien pakistanais, islamiste radical fondateur du parti Jamaat-e-Islami. Il existe aujourd’hui un néo-fondamentalisme, plus moderne,  dont les adeptes se recrutent dans la jeunesse intellectuelle musulmane.

L’intégrisme, terme lié historiquement au catholicisme prône le maintien des valeurs traditionnelles. Son usage s’est étendu à toute forme d’intransigeance doctrinale, sans aucune connotation spécifique au monde musulman.
 
Le post-islamisme est un terme acclimaté par Olivier Roy, se veut une forme moderne de l'islamisme réconciliant tradition et modernité, et  prônant une réislamisation des cœurs dans l’oumma, la communauté des croyants. Il s’appuie sur l’exemple de la Turquie, Etat laïque.

Le wahabbisme est une doctrine islamique issue du hanbalisme. Il a été fondé vers 1745 par le cheikh Mohammed ibn Abd el-Wahhâb et préconise un retour de l’islam à̀ celui des origines, celui de Mahomet et de ses compagnons. Il a été adopté par le Royaume d’Arabie Saoudite créé en 1932, et se veut garant d’une stricte orthodoxie religieuse. Sa doctrine interdit toute représentation humaine figurée,   et considère les sites construits autour des défunts comme de l’idolâtrie.

Le salafisme , étymologiquement mouvement des ancêtres, c’est-à-dire de Mahomet et des premiers califes, est un mouvement sunnite qui se considère comme l’avant-garde des musulmans du monde. Il revendique  un retour à l’islam des origines qui permettrait de surmonter les crises du monde moderne,  mais conteste la légitimité de la dynastie saoudienne à s’exprimer au nom de tous les croyants. C'est une synthèse entre  le fondamentalisme pour la réislamisation de la société par la parole et l’éducation, et le jihadisme pour le combat contre les impies et la création d’un état islamiste, opposé à l’influence occidentale, à la démocratie et à la laïcite.  Ses disciples prétendent imiter Mahomet en tout,  y compris dans leur facon de s’habiller.

Le soufisme est le mysticisme de l’islam. Il est centré sur l’intériorisation, la contemplation et la sagesse,  organise en confréries et  combat le vice sous toutes ses formes : consommation de drogues et de boissons alcoolisées, prostitution, corruption, mensonge. Souvent persécutés ou tournés en dérision pour des pratiques comme la flagellation ou la danse des derviches tourneurs, ils sont respectés en raison de leur élévation d’esprit et de leur recherche de Dieu dans la pureté.


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